jeudi 31 août 2023

Programme limitatif 2023 2024 (TERMINALE SPE)



1. Du projet à la réalisation d'une œuvre monumentale


  • Claude Monet (1840-1926), Cycle des Nymphéas du musée de l'Orangerie, entre 1897 et 1926, huile sur toile, H. : 1,97 m, L. : environ 100 m linéaires, surface environ 200 m2. Paris, musée de l'Orangerie ;
  • Huang Yong Ping (1954-2019), Serpent d'océan, 2012, aluminium, sculpture monumentale, L. : 128 m, H. : 3 m, création pérenne dans le cadre du parcours Estuaire. Saint-Brevin-les-Pins, Pointe de Mindin, Loire-Atlantique.

2. Nature à l'œuvre


  • Joachim Patinir (vers 1480-1524), Saint Jérôme en pénitence, dans le désert  (ou Saint-Jérôme dans le désert), vers 1515-1520, huile sur panneau de bois, H : 78 cm, L : 137 cm. Paris, musée du Louvre ;
  • Rosa Bonheur (1822-1899), Labourage nivernais, 1849, huile sur toile, H : 133 cm, L : 260 cm, achat après commande de l'État en 1849. Musée d'Orsay, Paris ;
  • Miguel Chevalier (1959-), Sur-natures, sous-titre : Paradis artificiel, 2004, nouveau média interactif, plantes virtuelles réalisées avec le logiciel Music2eye, projetées sur un mur, les végétaux bougent en fonction des mouvements du public, captées par un détecteur de présence et mouvements, CD-Rom, programme informatique, dimensions variables. Centre national des arts plastiques, en dépôt depuis 2016 au Frac Picardie, Amiens.

I. DU PROJET A LA REALISATION D'UNE OEUVRE MONUMENTALE :

- Claude Monet (1840-1926), Cycle des Nymphéas du musée de l'Orangerie, entre 1897 et 1926, huile sur toile, H. : 1,97 m, L. : environ 100 m linéaire, surface environ 200 m2. Paris, musée de l'Orangerie ;

- Huang Yong Ping (1954-2019), Serpent d'océan, 2012, aluminium, sculpture monumentale, L. : 128 m, H. : 3 m, création pérenne dans le cadre du parcours Estuaire. Saint-Brevin-les-Pins, Pointe de Mindin, Loire-Atlantique.



► Les Nymphéas de Claude Monet (1840-1926) au Musée de l'Orangerie à Paris
et plus particulièrement : Cycle des Nymphéas du musée de l'Orangerie, entre 1897 et 1926, huile sur toile, H. : 1,97 m, L. : environ 100 m linéaire, surface environ 200 m 2. Paris, musée de l'Orangerie ;

Salle 1 de l'Orangerie Paris Les Nymphéas de Claude Monet.




Le cycle des  Nymphéas de Claude Monet est un travail gigantesque, longuement médité, mûri, installé par la suite dans une architecture spécialement conçue pour lui, dans l'Orangerie des Tuileries à Paris qui n'a été ouvert au public qu'après sa mort selon sa volonté. 

"L'Orangerie abrite 8 compositions de même hauteur (2 m) mais de largeurs différentes, réparties sur les parois arrondies de deux salles ovales.L'ensemble, une des plus vastes réalisations monumentales de la peinture de la première moitié du siècle, représente une surface d'environ 200 m2. Les dimensions mêmes de la surface couverte et cette disposition qui environne, qui encercle, en quelque sorte, le visiteur fasciné dans le brouillard coloré, surprennent moins aujourd'hui, l'environnement faisant partie des moyens d'expression de l'artiste du XXe siècle."
(extraits des propos de Michel Hoog "les Nymphéas de Claude Monet")



Les Nymphéas salle 1



Les Nymphéas salle 2


Monet prendra la décision en 1918 à la fin de la première guerre mondiale de donner à l'Etat deux panneaux. 
"Cher et grand ami,
je suis à la veille de terminer deux panneaux décoratifs que je veux signer le jour de la Victoire, et viens vous demander de les offrir à l'Etat par votre intermédiaire. 
C'est peu de chose, mais c'est la seule manière que j'ai de prendre part à la Victoire. Je désire que ces deux panneaux soient placés au Musée des Arts Décoratifs et serais heureux qu'ils soient choisis par vous. 
Je vous admire et vous embrasse de tout mon cœur. Claude Monet. " Lettre à Georges Clemenceau le 12 novembre 1918

FinalementClemenceau convaincra Monet de ne pas donner deux panneaux mais 8 compositions en 22 panneaux qui seront  installés après sa mort.


► Pour comprendre la genèse de ce projet de Monet, il faut remonter à la création de ses jardins à Giverny. 

Monet durant toute sa vie ne s'est jamais beaucoup éloigné de la Seine auprès de laquelle il se sent bien. En 1883, il loue une maison à Giverny (il a 43 ans)  au moment où tous ses confrères impressionnistes et amis s'éloignent de Paris : Renoir part dans le Midi, Sisley à Moret, Cézanne retourne à Aix en Provence. En 1890, il finit par acheter cette propriété, sa situation financière est devenue plus confortable, c'est l'époque où il peint la série des meules qu'il trouve autour du village, et travaille également dans son jardin. Il l'agrandit, achète du terrain pour l'étendre, creuse des bassins pour y installer des nénuphars dans l'intention de trouver des motifs à peindre. 

Plan de la propriété à Giverny avec les jardins. 

Monet va y passer plus de 40 ans de sa vie et va construire en 1914 un vaste atelier spécialement pour peindre les grands nymphéas dont il a commencé le cycle en 1897. 
Le cycle des Nymphéas comprend plus de 300 tableaux dont plus de 40 panneaux de grands formats et trois tapisseries sont tissées également. 

Deux types de compositions sont définis par l'artiste dès le départ :
- L'une englobe les rives du bassin et leur végétation touffue (bassins aux nymphéas de 1899 -1900, puis ponts japonais).
- L' autre joue sur le vide, de gros plans au cadrage serré ne représentant que l'eau et sa ponctuation de fleurs et de reflets en all-over. (paysages d'eau 1903-1908)

Le bassin aux Nymphéas : harmonie verte 1999 huile sur toile 89.5x92.5


Nymphéas 1907 huile sur toile 81.1x92.1 


Dès 1870, bien avant les Nymphéas, Monet représente à plusieurs reprises les mêmes sites en ne faisant varier que la lumière. L'idée de série apparaît. Il commence plusieurs toiles en même temps, afin de suivre l'évolution du soleil dans le temps et le changement de couleurs.

"On chargeait des brouettes... d'un amas d'ustensiles, pour l'installation d'une suite d'ateliers en plein air, et les chevalets s'alignaient sur l'herbe pour s'offrir aux combats de Monet et du soleil. C'était une idée bien simple qui n'avait encore tenté aucun des lus grands peintres. Monet peut en revendiquer l'honneur." Georges Clemenceau.

Dès les 1eres représentations des Nymphéas, Monet cherche à rompre avec les formats habituels en utilisant le format carré très peu répandu à l'époque dans la pratique impressionniste.

Après avoir décidé de faire une donation à l'Etat, Claude Monet imagine avec un architecte la construction d'une rotonde avec une grande verrière éclairant la salle par le toit, dans le jardin du Musée Rodin l'hôtel de  Biron pour accueillir son oeuvre. 

Jean Villemer écrira " Il veut un pavillon spécial dans le jardin de l'hôtel de Biron, une salle ronde où ses toiles seront posées au ras du sol et se suivront sans la moindre séparation, en sorte que le spectateur placé au centre de cette salle pourra se croire dans l'île du lac japonais et verra autour de lui ce qu'il verrait dans le jardin de Giverny.(Le Gaulaois 16 octobre 1920)

Mais ce projet ne se fera pas, une autre solution lui sera proposée  : l'administration des Beaux-Arts décide d'affecter la salle du Jeu de Paume et celle de l'Orangerie au Musées  Nationaux, cette dernière est retenue pour accueillir les Nymphéas. 

Plusieurs fois devant ce grand projet, Monet se sentira découragé face à l'épreuve de la cataracte et aux échanges administratifs. Il détruisit un grand nombre de peintures. Ses Nymphéas montrent toute la poésie de l'eau, depuis l'aube jusqu'au crépuscule. 

Claude Monet dans son atelier à Giverny devant les nymphéas.


Claude Monet dans son atelier à Giverny devant les nymphéas.



Les 8 compositions  concaves à l'Orangerie sont réparties en 2 salles. l'ensemble pour l'époque est insolite. On a un sentiment de dépaysement, ce n'est ni un musée exposant une série de tableaux, ni une architecture avec une décoration murale, c'est un environnement coloré situé à la hauteur de l’œil occupant le champ visuel. Monet s'inspire de l'art japonais. Les peintures ne comportent pas de détails lisibles, rien n'accroche l’œil, tout est en all-over. La gamme colorée est peu variée et homogène, dominée par les bleus-violacés et les verts, les nénuphars n’apparaissent qu'à certains endroits, la représentation se dérobe, Monet flirte avec l'abstraction, supprime la profondeur.

Claude Monet abandonne la réalité, la simple traduction des apparences pour une réalité plus profonde telle qu'elle apparaît dans la profusion de lumière, d'eau et de végétation. C'est une quête de l'impalpable, de ce qui est changeant dans le monde visible : la lumière. Ce caractère novateur dans l'abandon de la lisibilité  n'est pas toujours compris par le public attaché à la représentation. L'ouverture au public de l'Orangerie après sa mort n'a d'ailleurs pas eu un succès foudroyant tout de suite. L'absence de ligne d'horizon, l'effet miroir de la surface de l'eau font perdre les repères au spectateur. La peinture est épaisse, les traces de pinceaux sont visibles plus que ce qu'elles représentent, on reconnaît ici et là des troncs, des branches, quelques fleurs, mais le reste devient matière, plongeant le spectateur dans la couleur. 
Le toit percé laisse passer le jour, éclairant selon le moment de la journée ou de la saison différemment, les Nymphéas prennent d'autres couleurs. 

Les Nymphéas à l'Orangerie à Paris. Eclairage zénithal.


Monet lutte avec sa vision altérée par la cataracte. Il a perdu la vision d'un œil, et se fait opérer de l'autre, ce qui lui change sa perception des couleurs; Il est souvent découragé, ayant le sentiment d’abîmer ses toiles. Une amélioration de sa vue lui permettra d'achever le projet sous la pression de Clemenceau. Mais cette vision altérée lui ouvre une nouvelle voie vers une dissolution progressive des détails, donnant une dimension plus abstraite et lyrique à son travail.  La série des Nymphéas témoigne au fil du temps d'une perte (qui sera vivement critiquée par ses pairs) mais aussi d'un profit ouvrant la voie à la nouvelle génération. 
Monet libère la couleur et la lumière du carcan formel, explorant tous les éclairages naturels possibles de ses bassins, le format immense de ses dernières toiles immerge le spectateur dans la couleur, sa technique du all-over sera reprise par les artistes de l'expressionnisme abstrait comme Jackson Pollock. 

- 8 panneaux concaves de 6 à 17 mètres de long.
- 200 m2 de surface peinte. 
- Conception en cercle conçue par l'artiste pour plonger le visiteur dans une méditation paisible. 


Les nymphéas soleil couchant de la salle 1

¨Plan des deux salles du musée de l'Orangerie.







Claude Monet (1840-1926)Le bassin aux nymphéas – 1917-20 – Huile sur toile –
 Panneau 1: 200,6 x 300,7 cm, panneau 2: 200,7 x 300,9 cm, 
panneau 3: 200,7 x 301 cm – Fondation Beyeler, Bâle


Détail du bassin au nymphéas ci dessus. Technique du all-over


Visite virtuelle de l'Orangerie ICI 


L'Orangerie sera endommagée en 1944 durant la seconde guerre mondiale, un obus dégrada la salle des Nymphéas ainsi qu'un des panneaux qui sera vite restauré.

Le "serpent d'océan" de HUANG YONG PING est une sculpture monumentale en aluminium installée en 2012 à Saint Brévin les Pins en Loire atlantique en France. Elle se situe à l'embouchure de l'estuaire de la Loire ( à la limite de l'espace fluvial et maritime)  Elle est longue de 130 m .  Elle représente le squelette d'un immense serpent des mers imaginaire qui ondule le long de la plage.

La queue est située à la limite de la marée basse et la tête à la limite de la marée haute ce qui fait qu'elle est toujours visible, contrairement à la queue. C'est donc une œuvre qui intègre et s'inscrit dans  le cycle des marées et qui va changer d'aspect selon le moment de la journée. Non loin de là se trouve le pont de Saint-Nazaire et la sculpture fait écho avec les courbes de l'édifice.

En installant sur une plage européenne un des principaux animaux mythologiques chinois, Huang Yong Ping crée un lien culturel entre l'occident et l'orient. Comme si le serpent avait pu traverser l'océan pour s'échouer sur la rive française et terminer son voyage. C'est un squelette, le serpent est mort. Mais la vie reprend ses droits puisque la marée bouge autour de lui et la sculpture va finir par accueillir faune et flore marines en son sein.
la sculpture est pérenne comme fossilisée. L’artiste aborde le choc des cultures et leur complémentarité.





ŒUVRE COFINANCÉE PAR L’UNION EUROPÉENNE 

LE SERPENT DE MER DE HUANG YONG PING 



SERPENT D'OCÉAN - HUANG YONG PING FROM MACHINEMACHINE ON VIMEO.


En 2016, lors de l'exposition "Empire" MONUMENTA au Grand Palais à Paris, l'artiste aborde le thème du pouvoir et du commerce. Il ne faut pas oublier que Huang Yong Ping est originaire d'une ville portuaire de Chine avec un grand trafic de marchandises. En déambulant dans l'installation, le spectateur observe des conteneurs superposés, mêlés à un serpent monumental, si grand qu'il est impossible de l'appréhender d'un seul coup d’œil.  Le squelette fait encore une fois ici écho à l'architecture de métal du Grand Palais.  L'ensemble mêle habilement les échanges entre l'occident et l'orient, la tradition et la modernité, ligne courbe organique et formes rectilignes, le minuscule (public) et le monumental, les couleurs et le gris.





Yuang Yong Ping : exposition "Empire" MONUMENTA au Grand Palais à Paris 2016

 

II. NATURE A L'OEUVRE

Joachim PATINIR 1480-1524  Pays Bas

Joachim Patinier ou Patinir est né vers 1480 1484 à Dinant (Pays Bas) et mort en 1524 à Anvers, il fait partie des peintres flamands de la Haute Renaissance, initiateur du genre "paysage" dans la peinture occidentale. Ses œuvres s'inspirent de l'histoire chrétienne. 

► il utilise la perspective atmosphérique

► il utilise trois plans principaux distincts : 1er plan brun avec figures principales et accessoires + rochers, herbes, fleurs, arbres...  2eme plan à dominante verte avec de nombreux personnages représentés de manière très fine avec un pinceau très fin qu'il est même difficile de voir à l'oeil nu les détails présents et un arrière plan avec des reliefs très prononcés d'un bleu intense appelé "bleu Patinir" qui dialogue avec le bleu du ciel nuageux. Les tonalités vont du chaud vers le froid, ce qui donne cet effet de perspective atmosphérique. 

« Il avait une façon particulière de traiter le paysage avec beaucoup de soin et de finesse, ses arbres étant comme pointillés. Il y introduisait de jolies petites figures, en sorte que ses œuvres étaient recherchées, se vendaient bien et qu’elles se sont répandues en divers pays." Karel Van Mander (peintre écrivain flamand)

Saint Jérôme en pénitence, dans le désert. 1521 huile sur bois 0.995 x1.37 m 

détail 

découvrir ici les détails à la loupe 


Analyse de l'œuvre "Saint Jérôme en pénitence dans le désert"

Jérôme tire son étymologie de "gerar" = saint, et de "nemus" = bois. Jérôme veut donc dire bois saint. Jérôme a habité quelques temps dans un bois.  Au premier plan nous voyons Saint Jérôme se frappant la poitrine avec une pierre en signe de pénitence. A côté on remarque le manteau rouge ainsi que le chapeau des cardinaux, ce qui l'identifie comme ayant une fonction à l'église.  A l'arrière plan nous observons un paysage très escarpé. A droite se trouvent deux chameaux avec un équipage, évoquant un passage de la vie de Sant Jérôme dans la la légende dorée de Jacques de Voragine, de 1266. L'histoire de Saint Jérôme raconte qu'il avait dans le désert un lion comme compagnon, qu'il avait rendu doux comme un agneau en le soignant d'une blessure à la patte. Un jour des marchands auraient volé l'âne de Jérôme, gardé par le lion. Quelques jours plus tard, le lion aurait reconnu les voleurs, les aurait mis en fuite puis aurait ramené à Saint Jérôme leur caravane de chameaux. Ici, cette scène est secondaire, elle est reléguée au second plan car ce qui est important dans l'œuvre est le paysage.  Ici il représente le paysage sous différentes formes : plaines, montagnes, collines, rivières, et la mer au loin. Patinir s'inspire d'une région : la Vallée de la Meuse, proche de Dinant, dont il est originaire. La scène religieuse, scène principale, est pourtant de petite taille dans l'immensité du monde. Ceci montre le nouveau regard que porte les artistes de la Renaissance sur la grandeur du monde et sur la petitesse de l'homme face à la nature. L'atmosphère est dense, les couleurs s'éclaircissent et deviennent bleutées vers l'arrière plan, la profondeur se manifeste donc par une perspective atmosphérique traduite par une brume printanière. Patinir est l'héritier des grands peintres flamands du 15e siècles qu'on appelle les primitifs flamands (voir ici ) comme Jan Van Eyck par exemple (voir plus bas) dont leur peinture se caractérise par beaucoup de minutie et un grand réalisme et l'utilisation du glacis qui est une superposition de couches de couleurs transparentes vernies donnant une certaine profondeur et beaucoup de luminosité. 


Une fois, vers le soir, alors que saint Jérôme était assis avec ses frères pour écouter une lecture de piété, tout à coup un lion entra tout boitant dans le monastère. À sa vue, les frères prirent tous la fuite ; mais Jérôme s’avança au-devant de lui comme il l’eût fait pour un hôte. Le lion montra alors qu’il était blessé au pied, et Jérôme appela les frères en leur ordonnant de laver les pieds du lion et de chercher avec soin la place de la blessure. On découvrit que des ronces lui avaient déchiré la plante des pieds. Toutes sortes de soins furent employées et le lion guéri, s’apprivoisa et resta avec la communauté comme un animal domestique.  Jérôme ...  lui confia le soin de mener lui-même au pâturage et d’y garder l’âne qu’on emploie à apporter du bois de la forêt. Ce qui se fit : car l’âne ayant été confié au lion, celui-ci, comme un pasteur habile, servait de compagnon à l’âne qui allait tous les jours aux champs, et il était son défenseur le plus vigilant durant qu’il paissait çà et là. ... Or, il arriva que comme l’âne était à paître, le lion s’étant endormi d’un profond sommeil, passèrent des marchands avec des chameaux : ils virent l’âne seul et l’emmenèrent au plus vite. À son réveil, le lion ne trouvant plus son compagnon, se mit à courir çà et là en rugissant. Enfin, ne le rencontrant pas, il s’en vint tout triste aux portes du monastère, et n’eut pas la hardiesse d’entrer comme il le faisait d’habitude, tant il était honteux. Les frères le voyant rentrer plus tard que de coutume et sans l’âne, crurent que, poussé par la faim, il avait mangé cette bête ; et ils ne voulurent pas lui donner sa pitance accoutumée, en lui disant : « Va manger ce qui t’est resté de l’ânon, va assouvir ta gloutonnerie. » Cependant comme ils n’étaient pas certains qu’il eût commis cette mauvaise action, ils allèrent aux pâtures voir si, par hasard, ils ne rencontreraient pas un indice prouvant que l’âne était mort, et comme ils ne trouvèrent rien, ils vinrent raconter le tout à saint Jérôme. D’après les avis du saint, on chargea le lion de remplir la fonction de l’âne  on alla couper du bois et on le lui mit sur le dos. Le lion supporta cela avec patience: mais un jour qu’il avait rempli sa tâche, il alla dans la campagne et se mit à courir çà et là, dans le désir de savoir ce qui était advenu de son compagnon, quand il vit venir au loin des marchands conduisant des chameaux chargés et un âne en avant. ... Le lion ayant reconnu l’âne, se précipita sur ces gens avec d’affreux rugissements et les mit tous en fuite. En proie à la colère, frappant avec force la terre de sa queue, il força les chameaux épouvantés d’aller par devant lui à l’étable du monastère, chargés comme ils l’étaient. Quand les frères virent cela, ils en informèrent saint Jérôme : « Lavez, très chers frères, dit le saint, lavez les pieds de nos hôtes  donnez leur à manger et attendez là-dessus la volonté du Seigneur. » Alors le lion se mit à courir plein de joie dans le monastère comme il le faisait jadis, se prosternant aux pieds de chaque frère. Il paraissait, en folâtrant avec sa queue, demander grâce pour une faute qu’il n’avait pas commise. Saint Jérôme, qui savait ce qui allait arriver, dit aux frères : « Allez, mes frères, préparer ce qu’il faut aux hôtes qui viennent ici. » ... indépendamment du mérite de sa foi et de ses vertus, Saint Jérôme était instruit dans le latin, le grec et même l’hébreu, à tel point que personne n’oserait se comparer à lui pour telle science que ce fût : ses combats et ses luttes contre les méchants étaient de tous les jours et de tous les instants... Il mourut vers l’an du Seigneur 398. "extrait de la légende dorée de Jacques de Voragine". 1266. 

On dit que Patinir aurait fait appel à des collaborateurs pour peindre les figures de premier plan comme Quentin Metsys autre artiste flamand. Patinir avait une forte influence sur d'autres artistes, à tel point qu'il est parfois difficile de discerner un Patinir d'un autre artiste. 


" Tentation de Saint Antoine" Joachim Patinir et Quentin Metsys 1515 huile sur panneau de bois, 155cmx173cm


Ci-dessous vous pouvez observer une deuxième version de l'œuvre de Patinir  visible à Venise au musée Ca d'Oro, très proche de celle étudiée, on peut voir que la composition est similaire, mais quelques petits détails différent, tels que l'emplacement des chameaux, l'arbre au premier plan, le village à gauche. A vous de voir les différences. 

Joachim Patinir "paysage avec Saint Jérôme" huile sur bois Musée Ca' d'Oro Venise









Ci-dessous vous pourrez observer une version différente de Saint Jérôme dans un paysage faite par un autre artiste :  Cornelis Metsys, fils de Quentin Metsys le célèbre collaborateur de Patinir. On retrouve bien l'influence du maître, Metsys y peint des détails visibles à la loupe comme par exemple la fine corde qui relie les animaux, ou oiseaux, abbayes, clochers, moutons, berger, cheval. Il dresse un inventaire large des formes naturelles ou créées par l'homme en choisissant un point de vue élevé, permettant une vision panoramique du monde. C'est un voyage de l'infiniment petit vers l'infiniment grand

"Paysage avec Saint Jérôme" de Cornelis Metsys 29.2x42.5 Musée de Grenoble. XVIe siècle huile sur bois.



Ci-dessous vous trouverez un des joyaux de la Renaissance Flamande de Jan et Hubert Van Eyck, qui ont inspiré Patinir. 
Jan Van Eyck Primitif flamand. Panneau central du polyptyque "L'Agneau mystique" 
Polyptyque monumental 5.20mètres x 3.75 mètres 24 panneaux . Jan Van Eyck et son frère Hubert 1432 huile sur toile- Gand. 

La peinture flamande se développe du début du XVe  au XVIIe siècle dans l'Europe du Nord en parallèle avec la peinture italienne. Les peintres flamands étaient invités dans les cours d'autres pays, et ont eu une grande influence dans toute l'Europe. Ce sont eux qui ont rendu la peinture à l'huile populaire avec l'utilisation du glacis. Très influencés eux mêmes par la Renaissance Italienne, leurs peintures sont pourtant très différentes, plus froides, plus translucides et lumineuses, très délicates. 


Rosa BONHEUR "Labourage nivernais" 1849 133 x 260 huile sur toile








"Les naturalistes reprennent l’étude de la nature aux sources mêmes, remplaçant l’homme métaphysique par l’homme physiologique, et ne le séparent plus du milieu qui le détermine" Emile Zola  

Rosa Bonheur est née le 16 mars 1822 à Bordeaux et morte le 25 mai 1899 à Thomery, c’est une peintre et sculptrice animalière. Son père Saint-simonien rentre au monastère laissant à sa femme la charge de l’entretien domestique et l’éducation des 4 enfants. Cette dernière tombe alors dans une grande pauvreté et meurt d’ épuisement.

Rosa Bonheur devient alors orpheline de mère à 11 ans, son père lui donne une éducation émancipatrice qui l’ouvre aux arts et lui donne le goût des conquêtes et de ne rien s’interdire malgré son statut de femme. Son père croit en l’égalité des sexes « mon père m’a bien des fois répété que la mission de la femme était de relever le genre humain ». Son père est artiste paysagiste et professeur de dessin. Ses trois sœurs et frères deviennent tous artistes.

Marquée par cette expérience, elle décide de garder son indépendance et de ne pas dépendre d’un homme par le mariage. Rosa Bonheur a une personnalité très forte, elle ira jusqu’à porter des vêtements masculins pour modeler son identité. Le port du pantalon est interdit pour les femmes dans la sphère publique (loi existante bien que caduque jusqu’en janvier 2013). Rosa Bonheur sera obligée de demander une autorisation à la préfecture (permis de travestissement) qui devra être renouvelée régulièrement.

Elle aura comme compagne Nathalie Micas rencontrée durant l’enfance et présentée comme une amie dévouée et fidèle pendant 52 ans. Les photographies du couple reprennent les codes convenables de l’imagerie maritale et légitime. Nathalie Micas est également artiste et tient un registre de ventes pour Rosa Bonheur.


En 1860 ses revenus lui permettent d’acheter le château de By avec 4 hectares où elle se fait construire un très grand atelier et où elle va aménager des espaces pour ses animaux. Lion, lionne, cerf, mouton, gazelle, chevaux, sanglier, chat, chien, perroquet, singe, etc… se côtoient. Elle s’y installe avec Nathalie Micas et sa mère. Elle instaure un matrimoine.

Anna Klumpke, artiste américaine, sera sa deuxième compagne, elle restera au château de By jusqu’à la mort de Rosa Bonheur.

 

Sa carrière artistique :

En 1841 à 19 ans, son père décide qu’elle peut présenter au salon deux de ses œuvres « deux lapins »



Elle expose au Salon de 1845, 1848, 1849... Elle y est à chaque fois remarquée et médaillée. Elle reçoit sa première commande de l'état : "le labourage nivernais" (1848)

Elle atteint une vraie notoriété avec son tableau "marché aux chevaux" (1853), exposé au Metropolitan Museum of art de New York. Sa reconnaissance internationale lui vaut alors de faire des tournées en Belgique, en Angleterre, aux Etats-Unis...



"marché aux chevaux" 852-1855 huile sur toile 244.5x506.7 cm

 

En 1894 elle est la première femme à être promue chevalier dans l’ordre de la légion d’honneur, décorée par l’impératrice Eugénie.

Elle admire les peintres animaliers du siècle d’or flamand et hollandais. (voir ci-dessous).


Entrée des animaux dans l'arche de Noé - Jan Bruegel l'Ancien 1613 peinture sur bois 54.6x83.8

 

«  une chose que j’observais avec un intérêt spécial, c’était l’expression de leur regard… l’œil n’est-il pas le miroir de l’âme pour toutes les créatures vivantes ? »

Rosa bonheur montre un plus grand intérêt pour les animaux que pour les hommes. Elle s’inscrit dans les pas des peintres d’anatomie, elle fréquente les abattoirs pour assister à des dissections, son œuvre « aigle blessé’ est issu de son étude de l’œuvre de Rubens « l’enlèvement de Ganymède », elle garde en mémoire des sujets qu’elle observe pour les utiliser plus tard.



Pierre Paul RUBENS  - L'Enlèvement de Ganymède, Vers 1611-1616, huile sur toile, hauteur 204 cm, largeur 206 cm.



Rosa Bonheur   L’Aigle blessé    vers 1870 147.6x 114.6

 

Elle tisse des liens avec Napoléon III, l’impératrice Eugénie, le prince impérial, l’empereur du Brésil, la reine Isabelle II d’Espagne, la famille royale de Grande Bretagne, sa notoriété est importante à l’étranger et notamment aux USA.

 

Elle a un engagement écologique avant l’heure, un esprit insatiable de liberté, pionnière du féminisme en marge des modes artistiques de son temps, elle a une passion pour la nature et le monde animal, c’est une artiste hors norme et inclassable, ni complètement réaliste, ni vraiment romantique, ni anecdotique, ni lyrique. Elle est aujourd’hui l’icône du féminisme et du mouvement LGBTQI+

 

Elle est une virtuose du dessin, star de son temps elle tombera ensuite dans l’oubli. Si son nom est encore d’actualité c’est la femme qu’elle incarnait, sa vie exceptionnelle qui a sauvé l’artiste. Elle a été effacée de l’histoire de l’art à cause du mépris du genre animalier.

Elle était pourtant au château de By le pendant de Claude Monet à Giverny :

-       Ménagerie/Nymphéas,

-       Faune/flore,

-       Nature/culture.

Monet et Bonheur repensent les rapports entre nature et culture au XIXe siècle.

Moquée pour ses vaches, elle est taxée de ringarde. Son regard sur les animaux, mêlé à son éthique et son respect pour le vivant parlent aux générations actuelles. Pionnière en matière de protection animale, elle adhère à la SPA (société protectrice des animaux) à sa création en 1845, elle illustre un ouvrage qui dénonce la maltraitance animale, elle écrit sa pitié pour les animaux qui vont à l’abattoir et montre la révolte des chevaux malmenés dans « le marché aux chevaux » , elle fait partie des défenseurs de la forêt . Elle vit au cœur de la forêt de Fontainebleau, elle crée un espace de cohabitation femmes et animaux, certains animaux sont considérés comme de passage, modèles au service de son art, sa vie et son œuvre sont indissociables. Elle connait les végétaux, elle est en lien avec Millet, Courbet, Géricault, les préraphaélites, elle est influencée par l’art des USA.

 



Rosa Bonheur, Toutou le bien-aimé, huile sur toile, 1885



Le Roi de la forêt  Rosa Bonheur   1878

 

► L’œuvre au programme :



Rosa Bonheur (1822-1899), Labourage nivernais, dit aussi Le Sombrage, 1849, huile sur toile H. 133,0 ; L. 260,0 cm.

La carrière de ROSA BONHEUR prend un nouvel élan lors de proclamation de la IIe république au salon de 1848 où elle expose 6 tableaux et deux sculptures car elle reçoit une médaille d’or . Elle reçoit alors une commande du ministère de l’intérieur d’un tableau d’animaux dans un pâturage pour une somme de 3000 francs ; Pour cela elle séjourne chez des amis de son père, propriétaires terriens dans la Nièvre pour y réaliser des études d’animaux et de paysages afin de préparer le tableau « labourage nivernais » qu’elle veut présenter au salon de 1849. Son père mourra quelques semaines avant l’ouverture du salon et ne verra pas le triomphe de son tableau le plus célèbre ; Les critiques du salon sont unanimes pour dire que la majorité de ce qui est exposé durant ce salon est médiocre à l’exception de « labourage nivernais » qui recueille les louanges des visiteurs. Le succès du tableau repose également sur une nouvelle sensibilité républicaine où les scènes représentées sont celles du peuple, ordinaires. Les héros sont des bœufs ou des moutons.

Rosa Bonheur a choisi un format particulier, très grand, deux fois plus large que haut, permettant une vue panoramique et accentuant les sillons dans la terre. Les bœufs sont rendus avec beaucoup de précision, on ressent la lourdeur de leur attitude, la force de la traction, la lenteur du mouvement. Chaque modèle est individualisé, ce sont de véritables portraits d’animaux très fidèles, leurs regards sont dirigés vers le spectateur. La mise en scène produit une dynamique avec le raccourci des corps, les différents plans. L’homme est renvoyé à l’arrière-plan, au premier plan les sillons fraichement labourés sont d’une précision incroyable. C’est la terre nourricière, sous un grand ciel bleu qui occupe la moitié de l’espace. Rosa Bonheur montre une vue du monde rural idéalisée, un amour de la nature. 

Le thème du labourage a été exploitée auparavant comme on peut le voir dans l’œuvre de François-André Vincent « la leçon de labourage » 1798, il n’est pas impossible d’ailleurs que Rosa Bonheur ait pu le voir à Bordeaux au musée des Beaux Arts.  Les deux artistes exaltent une terre fertile. La peinture de Rosa  Bonheur avec son format gigantesque est comme une allégorie évoquant quelque chose de primitif, d’antique, presque religieux. Un moment paisible du travail agricole, rassurant. L’homme est peu mis en avant, d’ailleurs la condition sociale des paysans semble passer sous silence dans sa peinture. Jean François Millet artiste du mouvement réaliste, bénéficie comme Rosa Bonheur d’une reconnaissance publique avec l’avènement de la IIe république. Avec «  le Semeur » présenté au salon de 1850, il donne une stature inquiétante  au paysan, le visage est dans l’ombre, les semailles sont comme le labourage, elles s’ancrent dans un geste ancestral et universel, mais contrairement à Rosa Bonheur qui veut donner une certaine idée de la quiétude, Millet lui est plus pessimiste, plus dénonciateur des conditions difficiles des paysans. On retrouve la dynamique donnée par la diagonale, mais on ressent la sensibilité socialiste de l’artiste.

« Le labourage à Hivernais » de Rosa Bonheur aura un rayonnement important auprès de ses confrères, tels que Constant Troyon avec « Bœufs allant au labour, effet de matin » de 1855, ou Gustave Courbet avec «  La sieste, pendant la saison des foins, montagnes du Doubs » 1869



François-André Vincent (Paris, 1746 – Paris, 1816), L’Agriculture, 1798, huile sur toile, Bordeaux, musée des Beaux-Arts. hauteur : 213 cm ; largeur : 313 cm

 



Jean François Millet « le semeur » 1850 huile sur toile, 101.6 x 82.6 cm

 



GUSTAVE COURBET  

« la sieste, pendant la saison des foins, montagnes du Doubs » 1869 huile sur toile 212x273

 



Constant Troyon

Bœufs allant au labour, effet de matin

En 1855

Huile sur toile

H. 262,0 ; L. 391,0 cm.

 

« Labourage nivernais » appelé sombrage, est effectué au début de l’automne, où l’on ouvre la terre pour l’aérer avant l’hiver.  On est face à un paysage avec une plaine vallonnée et fermée par un coteau boisé, il y a deux attelages de bœufs. Les bœufs du Charolais-Nivernais ont une robe claire, rousse et blanche, ils sont mis en valeur par la lumière froide et claire. La scène animalière laisse peu de place à l’homme représenté petit et dont le visage n’est pas bien précis. C’est un hymne au travail des champs opposé à la ville, à la province, et plus particulièrement au Nivernais, à ses traditions agricoles. Le tableau fut conservé à Paris au musée du Luxembourg, puis au Louvre à la mort de l’artiste avant de rejoindre le musée d’Orsay. La composition est divisée en deux parties, il y a un côté terrien et un autre côté aérien, très dégagé ; le bœuf au centre au pelage très clair a la tête tournée vers le spectateur, son œil brille et est très expressif. De l’écume sort de sa gueule, donnant une forme de mouvement, comme si l’image était prise sur le vif. On pourrait presque entendre sa respiration, le son de ses sabots. Son regard inclut le spectateur dans la scène. 


► Miguel CHEVALIER  artiste français né en 1959 au Mexique "Sur-natures, sous-titre : Paradis artificiel" 2004, nouveau média interactif, plantes virtuelles réalisées avec le logiciel Music2eye, projetées sur un mur, les végétaux bougent en fonction des mouvements du public, captés par un détecteur de présence et mouvements, CD-Rom, programme informatique, dimensions variables. Centre national des arts plastiques, en dépôt depuis 2016 au Frac Picardie, Amiens.

Pionnier de l'art virtuel et numérique, Miguel Chevalier utilise l'informatique depuis 1978. Son travail expérimental et pluridisciplinaire aborde la question de l'immatérialité dans l'art, l'hybridation, la générativité, l'interactivité. Ses œuvres sont réalisées in-situ, elles sont projetées sur des architectures, ou sur écran LCS, ou sous forme d'installations projetées. Ses œuvres fixes sont des dessins réalisés par des robots, des sculptures par impression 3D ou découpe laser. 





►L’art génératif de Miguel Chevalier

"La thématique « Nature à l’œuvre », présente dans les œuvres, thèmes et questions de référence du baccalauréat pour l’enseignement de spécialité d’arts plastiques en classe de terminale en vue de la session 2024, est illustrée par une œuvre numérique générative intitulée Sur-natures, sous-titre : Paradis artificiel, réalisée par l’artiste français Miguel Chevalier.

Cette œuvre singulière de réalité virtuelle, générative et interactive reconstitue une nature simulée aux couleurs saturées. Les outils numériques de captation et de programmation intrinsèquement liés à l’œuvre permettent de générer le mouvement de plantes virtuelles produit par le déplacement des spectateurs devant celle-ci.

L’art génératif est une catégorie de l’art numérique. Il repose sur la production par l’artiste d’un programme informatique qui confère une certaine autonomie à l’œuvreMiguel Chevalier développe cette pratique dans l’exposition Paradis artificiel en créant un algorithme simulant un jardin virtuel semblant se régénérer à l’infini. L’art génératif permet de produire des univers virtuels dans lesquels le spectateur peut s’immerger et interagir avec l’espace. L’artiste-programmeur y serait-il un démiurge (dieu créateur de l'univers) qui donne vie à tout un écosystème ? L’art génératif de Miguel Chevalier propose aux spectateurs de vivre une expérience unique où le numérique revêt une dimension quasi magique. En effet, dans les dispositifs multimédias proposés par l’artiste, l’appareillage technologique est masqué afin que cette « magie » opère pleinement. C’est la promesse d’un art reposant sur la programmation algorithmique, dont on ne perçoit pas les rouages, mais uniquement les effets produits. L’artiste ne crée plus l’œuvre, il crée la création. L’œuvre de Miguel Chevalier ne se résume donc pas à l’utilisation de moyens technologiques, mais s’inscrit pleinement dans une histoire de l’art. Ainsi, le médium numérique permet de produire un art total, héritier direct du Bauhaus. Le site personnel de l’artiste nous présente sa démarche prenant ainsi la forme d’un herbier virtuel.(source : Eduscol. education.fr)








Miguel Chevalier, Sur-Natures 2004 from Miguel Chevalier on Vimeo.

Extrait vidéo de l’oeuvre Sur-Natures (Paradis Artificiel), 2004 de Miguel Chevalier.
Création logicielle Music2eye Oeuvre de réalité virtuelle générative et interactive projetée au mur
Logiciel par le collectif Music2eye

Oeuvre unique

Dimensions variables
1 ordinateur avec le logiciel de l’œuvre, 1 vidéoprojecteur, 1 caméra infra-rouge pour l’interactivité.

Achat à la Galerie Tarasiève en 2006 par le Centre national des arts plastiques.
En dépôt depuis 2016 au Frac Picardie, Amiens.


" Ces recherches ont plusieurs origines. Cette inspiration vient tout d'abord de mon enfance passée au Mexique et de mes voyages en Amérique Latine où la nature est omniprésente et luxuriante.  Avec mes parents, nous nous rendions très souvent dans une petite maison de campagne à 150 km de Mexico. J'étais fasciné par énormément de plantes étranges qui poussaient dans le jardin, en particulier par des plantes carnivores .... Cette inspiration provient également de mes séjours de plusieurs mois à Kyoto au Japon, à l'occasion de ma résidence à la Villa Kujoyama en 1993 et 1994. Kyoto est la ville des temples et des jardins, le jardin japonais est un monde de l'artifice où tout est maîtrisé dans ces moindres détails : de l'organisation de l'espace à la croissance des fleurs et des arbres. Cette parfaite maîtrise a influencé ma création. Enfin le thème de la nature est un thème récurent dans l'histoire de l'art. Tout l'art de la peinture à travers les différentes époques a été de s'inspirer de la nature pour la transposer, la réinventer, la sublimer, ou pour la recomposer comme Cézanne par "la sphère, le cône et le cylindre", avec Mondrian en géométrisant ses formes.  Monet a tenté à travers la peinture et avec ses variations sur le cycle des saisons, de capter le rapport au temps et au changement de la lumière. Comme les tableaux de Monet, mes compositions numériques évoluent au fil du temps, procèdent d'une rencontre entre lumière et la couleur sur une surface plane. Toutefois, au lieu d'avoir une série de toiles, on se retrouve face à une œuvre qui s'autogénère et se développe à l'infini. " Miguel Chevalier. 

Source : https://arts-plastiques.ac-normandie.fr/?Miguel-Chevalier

Miguel Chevalier, né au Mexique, s'inspire du monde végétal et des recherches en laboratoire sur la croissance des plantes, il l'observe et le transpose de manière numérique, pour cela il travaille avec une équipe d'informaticiens pour créer des jardins virtuels. Il invente 4 herbiers virtuels avec fleurs et graines imaginaires.  

Pour créer des plantes qui se génèrent de manière virtuelle, qui ont un processus de vie, il s'inspire de  végétaux existants, pour cela il crée des algorithmes empruntés à la biologie, qui permettent de créer une vie artificielle avec des croissances, prolifération et disparition. Les fleurs virtuelles ont leur propre vie, elles s'épanouissent en temps réel, grimpent, meurent et reprennent vie comme une plante réelle le ferait dans la nature. L'ensemble réagit à la présence du spectateur, l'évolution est infinie, les végétaux sont en constante métamorphose. 

"Nous sommes entrés dans une ère où la vie artificielle est devenue possible. Aujourd'hui on modélise et on simule de plus en plus dans les laboratoires, les conditions de vie du vivant, végétal e animal. Nombreux aujourd'hui sont les aliments, tels que les légumes et fruits, qui poussent hors sol, dans des espaces totalement artificiels comme les serres. Je me suis inspiré de ces recherches pour les appliquer à une flore imaginaire" Miguel Chevalier. 


1. SUR-NATURES 2003-2021 (oeuvre au programme limitatif)

C'est la première génération de graines et de jardins virtuels créés des les années 2000 en collaboration avec les informaticiens MUSIC2EYE.

Le logiciel de l'œuvre se compose d'un herbier de 27 graines virtuelles avec chacune son propre code morphogénétique. Elles donnent naissance à de longues fleurs filaires et luminescentes de différentes couleurs, tailles, formes. 

Cette œuvre s'appuie sur un principe génératif. Les fleurs naissent aléatoirement, grandissent, s'épanouissent, fanent et renaissent. CHEVALIER compose un paysage comme un jardinier, certaines plantes poussent rapidement, avec une vie brève, d'autres poussent plus lentement. Le jardin est foisonnant. L'œuvre n'est plus dans l'ordre du fini, mais est toujours en devenir. Elle est autonome et s'autogénère en temps réel. Elle est également interactive, grâce à des capteurs de présence, elle réagit aux spectateurs qui peuvent jouer avec en utilisant le mouvement de leur corps. Les plantes se courbent de droite à gauche pour former des entrelacs "baroques" telle une danse, de manière poétique et méditative, comme une forme d'impressionnisme numérique.  

On y retrouve la sensibilité cosmique de Monet, 

- son exploration de la lumière, 

- du temps et de la nature, 

- le goût des séries comme dans les Nymphéas. 



Les œuvres de la génération Sur-Natures ont fait l'objet de nombreuses expositions dans des musées, centres d'art, galeries, métro, elles ont été présentées aussi bien en extérieur qu'en intérieur, dans des espaces publics à l'échelle architecturale (mapping vidéo). Elles ne sont jamais les mêmes, Miguel Chevalier compose un nouveau jardin, avec une colométrie différente, choisit les graines parmi les 18 de son  herbier, il choisit le rythme de croissance et de renouvellement.





2. FRACTAL FLOWERS 2008 2023

Cette œuvre se compose de 200 graines différentes en forme et couleur. Elle se distingue de Sur-Natures car elle intègre la troisième dimension. Nous sommes au croisement des univers végétal, minéral, animal et robotique.  Fractal Flowers utilise un nouveau logiciel crée par Cyrille Henry. Les fleurs démesurées dévoilent des formes poussées à l'extrême de leur géométrisation. Les graines sont autonomes et ont leur propre vie comme dans l'oeuvre précédente. Les fleurs peuvent muter, s'hybrider. Bien que paramétrable par l'artiste, elles donnent naissance à des nouvelles espèces qui n'ont pas été anticipées. Les fleurs ont à la fois une réelle monumentalité par leurs formes géométriques et en même temps un aspect évanescent lorsqu'elles s'évaporent dans l'air en quelques secondes.  Elles ont un aspect étrange, voire menaçant, elles sont interactives, elles se courbent vers le spectateur qui est incité à se déplacer. Elles suivent le mouvement du spectateur, créant un dialogue avec lui. 


3. SILENE LUMINARIS SIVE MUFLIER DE BORGES 2015

sculpture en inox, série Fractal Flowers. Fondation Clément, Le François, Martinique. 

A partir de son oeuvre Fractal Flowers vue ci-dessus, Miguel Chevalier peut générer une fleur imaginaire et obtenir une fichier 3D qui lui permet grâce à la technologie d'impression 3D de réaliser de petites sculptures/maquettes. Ce fichier 3D sert ensuite à réaliser des sculptures à échelle plus grande. Ci-dessous nous avons une fleur qui s'épanouit dans le parc de la fondation Clément en Martinique, parmi de nombreuses espèces exotiques, elle est en contraste avec le lieu vert. La nuit elle est illuminée.  Elle fait 3m x 2.70 x 3 m. 

Miguel CHEVALIER In / Out - Paradis Artificiels 2017 Domaine de Chaumont sur Loire from Claude Mossessian on Vimeo.



Au loin, un dôme aux reflets holographiques se détache calmement de la végétation. Des bruits de craquements, un murmure, une vibration sourde, le sifflement étouffé du vent… Lorsque l’on entre dans le dôme, c’est un kaléidoscope de formes organiques qui nous engloutit lentement, chaleureusement. On avance en douceur vers l’inconnu, vers cette musique sourde et réconfortante, vers ce qui pourrait être un chaos organique… La musique originale du compositeur Jacopo Baboni Schilingi  est une musique générative. C’est à dire, que comme la nature de Miguel Chevalier, la musique se génère et régénère en temps réel.
Pour sa musique, Jacopo Baboni Schilingi a exploité des sonorités issues du monde naturel : des sons concrets qu’il a pu enregistrer lors de ses voyages. Sa musique est calme, apaisante et envoûtante. Il a composé un système qui génère des sonorités qui invitent à la méditation.

C’est alors que les yeux s’ouvrent soudain sur une myriade de formes végétales projetées sur un plafond concave. Des fleurs apparaissent puis disparaissent, de gigantesques tiges s’entrelacent lentement puis s’évaporent dans le silence… Bienvenue dans le dôme que Miguel Chevalier a imaginé et crée.

Extrait du site : opnminded.com 

COURS 12 : LIENS ENTRE ARTS PLASTIQUES , THEATRE, DANSE ET MUSIQUE ( 1ERE SPE)

I. LIEN ENTRE ARTS PLASTIQUES ET DANSE ► Théâtralisation de l'oeuvre et du processus de création Nous allons étudier dans cette partie d...